Intelligence Artificielle

La guerre des assistants conversationnels – 1ère partie

La concurrence fait rage entre les géants du Net américains, qui cherchent à construire l’assistant conversationnel le plus performant possible. Si proposer un produit de qualité est un impératif, le gagnant pourrait bien être celui qui saura insérer son intelligence artificielle dans un écosystème riche et cohérent.

Lors de la dernière édition de l’événement Google I/O, qui s’est tenu à Mountain View, le CEO de l’entreprise, Sundar Pichai, a fait sensation en diffusant sur scène une conversation téléphonique enregistrée entre une employée d’un salon de coiffure et un client. Si une simple conversation au téléphone a fait les gros titres de la presse, c’est parce que le client n’était pas un humain en chair et en os, mais une intelligence artificielle conversationnelle de pointe, baptisée Duplex et mise au point par Google. L’objectif de cet assistant, capable d’avoir une conversation fluide et naturelle avec les humains, est de prendre des rendez-vous ou d’effectuer des réservations au téléphone pour le compte de son utilisateur. Il est pour l’heure encore en cours de développement.

google-duplex

Quelques jours plus tard, Microsoft, rival de Google sur le marché des assistants virtuels, a riposté lors d’un événement à Londres. Le CEO de l’entreprise, Satya Nadella, y a exposé les capacités de son intelligence conversationnelle Xiaoice, actuellement testée en Chine. L’assistant virtuel est capable de converser à la fois à l’écrit et par téléphone, et même de passer de l’un à l’autre, appelant par exemple un utilisateur à qui elle était en train d’écrire sur WeChat, une application de messagerie très prisée des Chinois. Lors de la démonstration, le CEO a précisé que l’intelligence artificielle avait déjà effectué un million d’appels. Plus tôt dans l’année, Alexa, l’assistant digital vedette d’Amazon, a de son côté dépassé les 30 000 compétences différentes sur le marché américain. Facebook a également prévu de lancer deux enceintes intelligentes cet été, tandis qu’Apple a sorti son Homepod en février dernier.

Une compétition féroce

Bref, pour les géants des nouvelles technologies américains, qui se situent tous à la pointe de la recherche autour de l’intelligence artificielle, la compétition se cristallise autour des assistants digitaux, ces agents conversationnels conçus pour assister l’humain dans la plupart des tâches du quotidien. Il peut s’agir, comme l’a montré Google, de planifier des rendez-vous. Mais aussi de lancer une playlist sur Spotify, de commander un taxi, de démarrer un programme télé, un minuteur pour la cuisine, ou encore d’éteindre les lumières. Dans la maison connectée idéale, telle qu’en rêvent ces géants du numérique, l’humain pourrait converser de manière fluide et intuitive avec son assistant personnel, pour lui demander tout un tas de services, que ce dernier se chargerait d’accomplir en régnant sur un écosystème cohérent d’objets connectés.

L’enjeu est de taille. En effet, à mesure que la technologie de reconnaissance vocale va s’améliorer, l’usage de la voix va devenir l’un des moyens privilégiés d’accéder à l’information. Or, comme le montre l’exemple de Google, qui a construit sa fortune en devenant le premier moteur de recherche sur la toile, l’accès à l’information constitue, à l’ère digitale, une importance source de pouvoir et de richesse. Si, pour l’heure, nul n’est encore parvenu à remporter le jackpot, le marché est dominé par Amazon et Google, tandis que Microsoft, Apple, Facebook ou encore Samsung, et son assistant Bixby, conçu pour la maison intelligente, se posent en concurrents. La compétition se structure autour de deux grands axes : le produit, d’une part, et l’effet réseau, d’autre part.

La guerre des assistants conversationnels

Entretien avec un robot

En matière de produit, Amazon a pour avantage de proposer, avec Alexa, davantage de possibilités que ses concurrents. Ainsi, tandis qu’Alexa a passé la barre des 30 000 « skills » sur le marché américain, Google Assistant en compte un peu moins de 2 000, et Cortana, l’assistant digital de Microsoft, moins de 300. Si l’assistant virtuel d’Amazon est le plus versatile, Google a pour lui une intelligence conversationnelle de meilleure facture. La démonstration de Sundar Pichai lors du dernier Google I/O a fait couler beaucoup d’encre car aucune intelligence artificielle n’avait jusqu’alors été capable de discuter avec des humains de manière aussi naturelle. En outre, grâce à son expertise en matière de moteur de recherche, Google a pu concevoir un assistant capable de répondre efficacement aux questions d’ordre général. Ainsi, l’entreprise de marketing Stone Temple a posé, dans le cadre d’une étude, 5 000 questions aux assistants virtuels d’Apple, Microsoft, Google et Amazon. Google Assistant a obtenu 91% de bonnes réponses, contre 87% pour Alexa, 82% pour Cortana, et 62% pour Siri (Apple). Or, un sondage réalisé par ComScore en mai 2017 montre que l’usage principal que les utilisateurs font de leur assistant digital consiste justement à poser des questions d’ordre général, devant le fait de demander la météo ou de lancer une playlist.

Stone Temple - agents conversationnels

Mais cela ne suffit pas à composer un partenaire de conversation naturel. Aussi impressionnantes les performances de Google soient-elles, Duplex demeure un prototype, et aucun assistant digital n’est pour l’heure capable de soutenir une conversation prolongée avec un humain. Les enceintes intelligentes font régulièrement rire les internautes par leurs réponses totalement à côté de la plaque. Amazon organise chaque année le Alexa Prize, un concours durant lequel le géant du commerce en ligne met au défi plusieurs équipes composées des meilleurs étudiants en informatique du monde de concevoir une intelligence artificielle capable de converser de manière cohérente avec un humain durant vingt minutes. En moyenne, les équipes en lice parviennent tout juste à atteindre les trois minutes. Néanmoins, grâce aux investissements massifs de ces entreprises, qui n’ont pas vraiment de problèmes de trésorerie, la technologie progresse à grands pas, et la course à l’intelligence conversationnelle la plus fluide et naturelle possible continue de susciter une vive concurrence, dont n’émerge pour l’heure aucun vainqueur.

Amazon et Google ont également commencé à se démarquer de leurs concurrents en permettant à leurs intelligences artificielles respectives de communiquer avec des images, en plus du texte et de la voix. L’an passé, Amazon a ainsi lancé l’appareil Echo Look, une enceinte intelligente dotée d’une caméra, qui agit comme un miroir intelligent permettant d’aider son propriétaire à choisir sa tenue du jour. Google, qui se situe depuis plusieurs années à la pointe de la recherche en matière de reconnaissance d’images, peut compter sur cette expertise pour développer les capacités de son assistant. Celui-ci est ainsi capable d’identifier un musicien sur une image et de proposer à l’utilisateur une liste de ses compositions.

Que pensez-vous de toutes ces nouveautés offertes par ces géants du net ? Les grandes entreprises américaines du numérique rivalisent actuellement pour proposer l’assistant digital le plus performant du marché, en poussant toujours plus loin leurs recherches autour de l’intelligence artificielle. Nous verrons cependant, dans un deuxième article, l’importance de mettre en place un écosystème d’objets connectés cohérent.

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